Agent immobilier et agent commercial

Agent immobilier et agent commercial : l’habit ne fait pas forcément le moine

A l’heure des annonces prématurées de la déréglementation des professions libérales chère au très libertaire commissaire européen Monti , la chambre commerciale de la Cour de cassation vient à travers un arrêt du 7 juillet 2004 , de rappeler la nécessaire application de la réglementation de la profession d’agent immobilier à l’égard de l’agent commercial ( Arrêt n°1160 FS- P +B).

En effet , dans le cadre d’un litige sur fond de rupture d’une relation contractuelle entre un agent immobilier et son agent commercial , les juges suprêmes ont entendu recadrer les nécessaires conditions d’exercice auxquelles doit répondre un agent commercial qui prête son concours de manière habituelle à la conclusion de contrats préliminaires à la vente, l’achat d’immeubles , de fonds de commerce ou de biens immobiliers pouvant même assister à l’authentification de ces opérations devant notaires .

Les magistrats retiennent que cette activité est régie par la loi du 2 janvier 1970 dite Loi Hoguet dont l’article 1er , modifié par l’article 3-I de l’ordonnance n° 2004-634 du 1er juillet 2004, précise que les dispositions de ce texte loi s’appliquent, notamment aux “personnes physiques ou morales qui, d’une manière habituelle, se livrent ou prêtent leur concours, même à titre accessoire, aux opérations portant sur les biens d’autrui et relatives à: 1° L’achat, la vente, l’échange, la location ou sous-location, saisonnière ou non, en nu ou en meublé d’immeubles bâtis ou non bâtis ; 2° L’achat, la vente ou la location-gérance de fonds de commerce […]”.

Dès lors , cette décision s’inscrit dans la lignée d’une jurisprudence déjà établie selon laquelle l’agent commercial d’un constructeur d’immeubles est assujetti à la loi du 2 janvier 1970 dès lors qu’il prête de manière habituelle son concours à la conclusion de contrats préliminaires à la vente, par son mandant, d’immeubles à construire, V. Cass. crim., 17 nov. 1993, Bull. crim., n° 342 ; D. 1994, IR p. 33 ).

A contrario , d’autres décisions avaient exclu du champ de la loi Hoguet : – le contrat en vertu duquel l’agent commercial n’est qu’un représentant mandataire du vendeur (Cass. 1re civ., 19 janv. 1979, Bull. civ. I, n° 17 ; RD imm. 1979, obs. Lombois) ; – la mission de conception, d’assistance et de commercialisation (Cass. 1re civ., 1er déc. 1993, Bull. civ. I, n° 349 (2 arrêts), D. 1994, IR p. 13 – Cass. 1re civ., 10 avr.1996 (2 arrêts), RD imm. 1996, p. 398, obs. D. Tomasin ) ; – la convention passée par la société de conseil en matière de défiscalisation qui ne joue qu’un rôle d’intermédiaire apporteur d’affaires rémunéré à la commission (CA Toulouse, 12 juin 2002, AJDI 2003, p. 293) ; – les conventions de rémunération conclues entre le mandataire initial et un négociant (Cass. 1re civ., 28 janv. 2003, Bull. civ. I, n° 20 ; D. 2003, IR p. 600).

Devant l’exiguïté de cette frontière que certains assimileront à de l’insécurité juridique , force est de s’en remettre à la théorie protectrice des droits et prérogatives du client , selon laquelle dans l’hypothèse où le mandat confié par l’agent immobilier ” titulaire ” à l’agent commercial concernerait des activités visées par la loi “Hoguet”, cette législation lui sera applicable : obligation notamment d’être titulaire d’une carte professionnelle avec inscription en préfecture et de disposer de la garantie financière attachée à l’activité exercée .

Toute autre apparaît pourtant la situation du salarié mandaté par le titulaire qui agit en effet sous le couvert et la responsabilité de son commettant sans que ne lui soit applicables à titre personnel les contingences professionnelles liées à la loi Hoguet . Pourtant en pratique salarié et agent commercial effectuent des missions similaires de négociation , transaction et accessoirement de conseil à l’égard des co-contractants qu’ils soient vendeurs , acquéreurs ou encore bailleurs ou preneurs . A cet égard , les conditions de diplômes et de qualifications nous apparaissent d’avantage comme une garantie minimale de reconnaissance professionnelle à l’égard des interlocuteurs consommateurs que comme un frein au libre exercice de la participation à une activité commerciale.