Lettre ouverte à ceux qui ont ouvert les yeux !

QUEL AVENIR POUR LES HUISSIERS DE JUSTICE

LETTRE OUVERTE A CEUX QUI ONT DEJA OUVERT LES YEUX .ILS LA LIRONT A CEUX QUI NE SONT PAS ENCORE DEVENUS SOURDS

Visa pour le désastre. C’est ainsi que François de Closets s’exprime sur l’état de nos finances publiques dans son ouvrage PLUS ENCORE. Cette maxime sied à merveille à notre profession en proie à une crise sans précédent , au point que beaucoup se rendent enfin à l’évidence : c’est pour nous que sonne le glas.

Cette crise est à la fois existentielle , politique et financière.

* Un état des lieux à titre de simple renseignement , néanmoins teinté d’un avis tiré de 18 années d’ exercice au cours duquel les coups bas ont d’avantage renforcé que tué

Les huissiers de justice sont politiquement infréquentables.

Rares sont les hommes politiques qui ont le courage de reconnaître publiquement devant un parterre de syndicats , associations de consommateurs et autres auxiliaires de justice , que notre profession est incontournable , à la fois véritable bras armé de la justice civile et rempart contre tous les excès de zèle des mandants. C’est cette indépendance qui semble déranger , alors qu’elle devrait bien au contraire rassurer .

Les chefs d’entreprise et les familles s’approprient leur avocat , leur notaire , leur expert-comptable , mais rarement leur huissier ; alors que nous intervenons sur l’ensemble de la chaîne judiciaire rendant nos fonctions extra-judiciaires , amiables et judiciaires indissociables tant dans le domaine de l’administration de la preuve que de l’exécution des décisions de justice.

Nous avons démontré au fil des décennies voire des siècles que l’exécution n’est pas exclusive du pouvoir décisionnaire , le dénominateur commun étant la réflexion et le bon sens que bon nombre – mais malheureusement pas la majorité d’entre nous – tirent de leur cursus universitaire du second voire du troisième cycle.

Il y a belle lurette que les études d’huissiers ne sont pas alimentées par les poubelles des universités. Nous nous prévalons des mêmes compétences et des mêmes diplômes de base que les magistrats , les notaires et les avocats.

Là où le bât blesse , c’est que nous sommes bien moins nombreux , bien moins organisés , bien moins représentés , et par conséquent moins bien écoutés. Il est pourtant inutile de rechercher hors de notre propre camp les causes de notre malaise .

Les huissiers de justice , combien de divisions ? De multiples , en la forme de stériles luttes intestines préjudiciables à l’avenir de la base. Pour ne citer que les guéguerres entre Chambre nationale et Syndicat jusqu’au prétoire , au seul nom des ego de leurs dirigeants respectifs avec les désastreux impacts que l’on connaît auprès de nos organes de tutelles ; ou encore les conflits de personnes au sein même de multiples bureaux de Chambre nationale .

L’absence d’esprit de corps qui caractérise notre profession dont l’individualisme transparaît à travers les conflits de personnes et de clans au sein de nos instances qui n’ont de représentatives que le nom , ne pouvant se prévaloir d’un mode électif au suffrage universel mais d’une cooptation au suffrage censitaire voire censuré des délégués nationaux , eux-mêmes désignataires d’un bureau à l’éphémère durée de vie de deux ans .

La base refuse en outre de subir les conséquences inhérentes au comportement de sa hiérarchie statutaire imposée pas plus qu’à leurs guerres de clans. Les commissions y sont aussi nombreuses et coûteuses que la succession des enterrements des problèmes .

Non contents de ne jamais se poser les bonnes questions et d’opter pour les bonnes orientations , les réponses apportées le sont toujours de manière tardive voire inappropriée : ils sont à côté de la plaque et totalement déconnectés de la réalité…..

Est il normal que les purges aient succédé aux purges depuis que le Président Roland SOULARD a cédé les rênes de la Chambre nationale au terme de son mandat statutairement non renouvelable de deux ans ? Sur fond de ” duplicité ” , la base découvrait avec effroi le départ du très ambitieux et brillant vice -président Dominique Hector vers la carrière d’avocat à quelques encablures de la cage dorée de la rue de Douai , et quelques années après l’intégration du président Belot sitôt son mandat achevé vers le corps des magistrats.

Pareils comportements en matière boursière auraient conduit leurs auteurs à répondre du délit d’initié. C’est dire si l’après moi le déluge a pris l’ascendant sur la préparation de l’avenir qui est pourtant aux yeux de la base, cochon payeur et de moins en moins naîve, la fonction première d’un organe dirigeant. Rien de tel en haut lieu . Nous avons été largués au milieu du gué .

Les erreurs , errements , scandales et règlements de comptes sont les seuls échos qui parviennent aux oreilles de nos autorités de tutelle et il en faut bien moins pour que ces dernières ne décrédibilisent toute une profession qui est en définitive la principale victime des agissements de ces pairs, que l’ont dit hiérarques mais qui se montrent incapables de prévoir et donc de gouverner , se contentant de tenir à bout de bras un statut que l’on nous a un temps jalousé , que l’on a un temps tenté de saborder et dont il apparaît désormais plus aisé de dépouiller de sa matière.

Nos hiérarques se sont mutés en coucous , lorgnant les nids des professions cousines. Autant de projets coûteux pour la base que d’échecs retentissants en terme de marchés pour avoir été menés sans concertation aucune avec d’hypothétiques partenaires et avec des troupes dispersées : recouvrement amiable , démarche qualité , loi Carrez , marchés publics , tentative d’immixtion dans les affaires d’autrui notamment celui des administrateurs et mandataires judiciaires qui s’est soldé par l’habile mise à l’écart textuelle qui doit ravir les confrères diplômés suite au cursus post universitaire qui leur avait été proposé (sur leurs deniers propres et sans feuilles jaunes….) avant la parution du décret d ‘application. Pas de bol , pour une fois que tentative d’anticipation il y avait , elle s’est soldée en confusion de vitesse avec précipitation.

Alors que notre domaine de compétence , et donc de prédilection légitime est ailleurs .

S’y consacrer ne peut que faire l’unanimité au nom de l’excellence du service rendu . Le commerçant est seul habilité à vendre , l’artisan à réaliser , le chirurgien à opérer , l’avocat à plaider .

Et pourquoi donc l’huissier ne serait-il pas celui qui doive exécuter les décisions de justice , mission pour laquelle la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991-dite la loi- nous attribue la responsabilité de la conduite des opérations ?

Nos hiérarques auraient mieux été inspirés d’adopter une ligne directrice tirée de nos connaissances juridiques en axant leurs démarches et contacts vers le recentrage vers les activités dévolues à notre profession par l’article 18 de la loi précitée ayant réformé les voies d’exécution qui consacre un monopole basé sur notre spécialisation juridique et intellectuelle en cette matière qui met à la fois à contribution des connaissances techniques et un certain empirisme tiré des réalités du terrain , essence même de l’instauration du statut de juge de proximité et qui avait en son temps consacré les audiences foraines , exercice de prédilection de tout juriste de terrain .

Base réveille toi , ils sont devenus fous.

Gare aux réactions des caves lorsqu’ils se rebiffent.

-Nous disparaîtrons s’il le faut , tout comme les dinosaures qui appartiennent à la préhistoire , mais appartenons-nous vraiment à cette espèce et notre heure est -elle vraiment venue ?

Les rapports de messieurs Monti et Camdessus sont autant d’écrits alarmants sur le maintien des monopoles dont la justification ne relève que de la pure protection des membres des professions en ligne de mire.

Or artisans taxis , pharmaciens et notaires , qui tout comme nous auraient lieu de s’inquiéter , se préparent à un été paisible . Les syndicats des uns , les partenaires industriels et les réseaux des autres les mettent à l’abri des premiers coups de semonce , alors que seuls les huissiers se sont vus contraints à réduire leur voilure sans pour autant que leur avenir ne soit assuré à très court terme .

L’exercice de notre profession à la mode de grand papa est certes relégué aux oubliettes . Et pour cause . Les actes d’exécution et les dossiers transmis en masse par les donneurs d’ordres dits institutionnels font partie d’une ère révolue.

Une étude ne doit plus sa rentabilité qu’à la valeur ajoutée de ces actes et à la matière grise de son titulaire , alors qu’il y a vingt cinq ans , elle la devait à la performance de ces ordinateurs qui faisaient leur entrée dans la profession et au réseau d ‘amitié que s’était tissé le maître des lieux auprès du top ten des mandants , épaulé par une brigade de clercs dont la dextérité à la manipulation des tampons encreurs n’avait d’égal que l’habileté à la programmation des procédures automatiques .

Or aujourd’hui , l’huissier est totalement imbriqué dans la chaîne du procès , sans que l’on puisse dissocier de son activité la partie amiable de l’aspect judiciaire , tous eux à caractère essentiellement humain.

Cet aspect a néanmoins totalement été mis à l’indexe par une infime minorité de praticiens , qui ont cru bon alors qu’ils n’en n’avaient ni le pouvoir ni la connaissance, mettre en place des réseaux de recouvrement dont la nature a valu à un de nos confrères des poursuites pour prêt de signature.

Il n’est dès lors pas surprenant que nous nous soyons attiré les foudres de nos autorités de tutelle face à de tels comportements , leur réaction à faire cesser ces excès est des plus normale .

Mais la base – très grande majorité non jugée digne de faire partie de ces réseaux commerciaux – saura à qui faire endosser la responsabilité de ceux qui ont cédé le Sceau de la République à des fins commerciales.

Il est vrai que le virage du recouvrement amiable a été si mal négocié par la profession pourtant meilleure garant de la sécurisation des fonds clients , du respect de la vie privée et encore de l’exploitation du renseignement civil et commercial sous l’autorité du Parquet .

Or nos aînés ont laissé prospérer les officines de recouvrement et d’enquêtes privées jamais avares de divulgation de bons tuyaux contre monnaie sonnante et trébuchante ou de phoning , avec aujourd’hui des entités délocalisées notamment en Irlande , et les organismes de prêt à la consommation se rendent aujourd’hui à l’évidence : le harcèlement amiable vaut plus dans certains cas que présenter en justice une action dont l’issue judiciaire et l’exécution relèvent de l’aléa .

On ne rattrape pas les erreurs du passé , pas plus celles d’hier que celle d’aujourd’hui , mais il importe que la mort de la majorité ne soit pas programmée au regard des errements d’une infime minorité.

-S’ouvrir d’avantage que libéraliser à outrance

Nous nous élevons contre tout immobilisme , l’absence de choix serait dès lors la plus mauvaise option.

-Il apparaît souhaitable de simplifier certains aspects de notre mode d’exercice notamment en matière de compétence territoriale en départementalisant a minima les conditions d’exercice .

Nos partenaires et donneurs d’ordres se réfèreront alors pour le choix de leur mandataire à une donnée universellement connue qui est celle de la limite départementale . Il est plus que fréquent que les professionnels du Droit se noient dans les méandres de la compétence attachée au tribunal d’instance et par conséquent s’en agacent .

-Il n’est pas un jour sans que notre Chambre nationale ne nous fasse part d’une loi déjà promulguée mettant en branle notre exercice quotidien nous annonçant avoir été mis devant la fait accompli . Eloignée des dorures du sérail , la base s’interroge donc sur l’opportunité d’instaurer une force de proposition et de concertation dont les membres , par leur indépendance et leurs connaissances , fassent l’unanimité .

Pas une profession dans l’hexagone n’accepterait de telles mutations sans avoir été prévenue et sollicitée par ceux là mêmes qui opèrent les modifications , commis de l’Etat ou élus , et encore moins sans y avoir été préparée . Il y va de la sécurité de nos actes et de notre responsabilité à ‘égard de nos interlocuteurs .

Nous entendons connaître les vraies rasions de ces options .

Soit nos instances sont décrédibilisées aux yeux de notre tutelle au point de passer pour portions congrues auquel cas il faut en changer .

Soit on veut notre disparition auquel cas il faut clairement exposer les faits , les motifs et songer à envisager l’avenir autrement que par une réforme irréaliste scindant notre profession en deux , séparant l’amiable du judiciaire . La transposition de la réforme des commissaires priseurs à notre profession nous apparaît illusoire et en tout cas préjudiciable au bon fonctionnement de la Justice.

-Un statut à la hollandaise ? Pourquoi pas . Il y a longtemps que nos confrères ont franchi le pas vers un statut qui privilégie d’avantage l’aspect libéral sur les prérogatives de puissance publique .

Mais pour ce faire , nous nous y prenons trop tard , ayant déjà perdu les marchés du renseignement , de l’amiable composition en matière de recouvrement des créances et des obligations .Il eut fallu négocier ce virage dès 1986.

Le seul confrère dont nous pouvons reprendre les écrits de l’époque , Charles GARETTO qui me fait régulièrement l’honneur de longues conversations téléphoniques depuis sa villégiature ensoleillée , n’avait rien d’une cartomancienne.

Son doigt avait montré la lune , nos aînés n’avaient vu que le doigt.

-L’huissier de justice , pendant civil du commissaire de police , devenu commissaire de justice , intégré au même rang que les magistrats au corps des fonctionnaires du ministère de la Justice.

Nos connaissances jumelées avec notre expérience nous conduisent vers une telle intégration ,à la double condition d’accepter de sortir d’un statut tellement hybride qu’il finira par nous étouffer , et de savoir convaincre nos interlocuteurs des corps constitués que nous sommes parfaitement capable de s’insérer dans le fonctionnement d’une juridiction.

Affaire et article à suivre .

Six mois se sont écoulés . .

Peu de son et peu d’image de la part des décideurs , et quelques réactions disparates de la part de confrères dont la grande majorité est d’avantage préoccupée par la gestion du difficile quotidien.

Néanmoins les AG annuelles d’octobre ont été ponctuées de débats et de prises de paroles de jeunes confrères plutôt enclins à assister silencieusement à cette Grand’messe statutaire . Des motions ont même circulé , des lettres ouvertes ont été adressées tous azimut et les “folles ” journées de Paris ont donné lieu à des prises de bec inhabituelles . .

Gare donc à l’équidé apeuré , son allure est d’avantage motivée par de la précipitation que ponctuée par une saine prédisposition à de la vitesse . Le mécontentement s’emballe et l’inquiétude croît.

Des AG extraordinaires sont même en cours de gestation et pas seulement pour étudier les impacts des réformes sur les sûretés , la saisie immobilière , le compte affecté ou encore le règlement communautaire du 12 décembre 2006 (JOUE du 30 décembre 2006 )instituant une procédure européenne d’injonction de payer.

En cette période de campagne nos politiques axent leur programme sur la Justice avec les droits des victimes en point d’orgue .

Mais que fait d’autre que de défendre les victimes l’huissier de justice qui exécute une décision de justice tendant à :

-faire recouvrer ses droits à un propriétaire immobilier dont le bien est occupé sans droit ni titre par des individus organisés y stationnés sans droit ni titre ,.

– restituer son bien mobilier ou immobilier à un bailleur , .

– obtenir son dû à l’administration fiscale impayée de ses taxes indirectes dont le redevable indélicat n’est qu’un détenteur précaire ,.

-obtenir la paiement des sommes dues au titre d’une pension alimentaire en faveur d’un créancier d’aliment ou encore au titre de salaires non versés par un commettant reliquataire. .

Nul doute que le juge aux victimes que beaucoup appellent de leurs voeux sera bien moins vilipendé que ne l’est l’huissier de justice aujourd’hui , aux fonctions qui pourraient lui être similaires.