Propriété intellectuelle , saisie contrefaçon , procès verbal de saisie de l’huissier de justice: La mission, rien que la mission .
Mandaté par une victime bénéficiaire d’une autorisation judiciaire pour procéder à une saisie contrefaçon , l’huissier de justice a le strict devoir de ne se cantonner qu’à la mission exclusive à laquelle le juge l’a autorisé.
Tout excès de zèle, aussi justifiable puisse t- il- être dans l’intérêt de la démarche tel que pourrait le dicter la loi du terrain, s’avère constitutif d’un dépassement de ligne blanche et a pour conséquence irrémédiable la nullité du procès-verbal de saisie contrefaçon.
L’intérêt ne saurait être trop souligné sur la nécessité de prévoir dans l’ordonnance toutes les alternatives destinées à optimiser la mission sans pour autant que les termes de la décision ne se cantonnent au vague ou au flou , trou de souris dans lequel le contrefacteur agissant en nullité ne tarderait pas non plus à s’engouffrer .
C’est dans ce sens que s’est prononcée la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans son arrêt du 7 juillet 2009 ( Com. 7 juillet 2009, F-P+B, n° 08-18.598) dans un attendu qui ne souffre d’aucune alternative :
« En l’absence de découverte préalable sur les lieux de la saisie d’objets argués de contrefaçon, l’huissier instrumentaire ne pouvait, sans y avoir été expressément et précisément autorisé, produire aux personnes présentes ceux des objets visés par l’ordonnance afin de recueillir leurs déclarations spontanées quant aux actes argués de contrefaçon, de sorte qu’en procédant comme il a fait, l’huissier instrumentaire a excédé les limites de sa mission ».
Gabriel DAHAN Huissier de Justice près le TGI De NANTES -44- Loire Atlantique.
Décision reproduite in extenso : FB COUR DE CASSATION Audience publique du 7 juillet 2009 Cassation Mme FAVRE, président Arrêt n° 674 F-PB Pourvoi n° F 08-18.598 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par : 1°/ la société France Gift, société anonyme, dont le siège est ZAC de la Malnoue Emerainville, 77313 Marne-la-Vallée, 2°/ la société Coccinelle, société à responsabilité limitée, dont le siège est 19 rue de l’Hôtel de Ville, 85100 Les sables d’Olonne, contre l’arrêt rendu le 28 mai 2008 par la cour d’appel de Paris (4e chambre, section A), dans le litige les opposant à la société Invicta, société anonyme, prise tant en son nom personnel que venant aux droits de la société Idex, dont le siège est rue de la Sonde, 08350 Donchery, défenderesse à la cassation ; Les demanderesses invoquent à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l’audience publique du 9 juin 2009, où étaient présents : Mme Favre, président, Mme Pezard, conseiller rapporteur, Mme Tric, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Pezard, conseiller, les observations de la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat des sociétés France Gift et Coccinelle, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Invicta, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à la société Philippe Angel-Denis Hazane de son intervention volontaire, en qualité de mandataire judiciaire de la société France Gift ; Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche : Vu l’article 332-1 du code de la propriété intellectuelle ; Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Invicta qui commercialisait par l’intermédiaire de sa filiale, la société Idex, deux modèles de dessous de plats en fonte décorés “Maïs” et “Truites” dont elle est l’auteur, a fait procéder à des saisies-contrefaçon dans la boutique de la société Coccinelle et dans le magasin d’exposition de la société France Gift ; qu’ensuite, les sociétés Invicta et Idex ont assigné les sociétés Coccinelle et France Gift en contrefaçon et concurrence déloyale ; Attendu que pour rejeter la demande de nullité des opérations de saisie-contrefaçon, l’arrêt retient qu’en recevant la déclaration spontanée de Mme Gendre, gérante de la société Coccinelle, et en saisissant réellement les deux documents remis par elle, spontanément également, l’huissier instrumentaire n’a pas outrepassé sa mission ; Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’en l’absence de découverte préalable sur les lieux de la saisie d’objets argués de contrefaçon, l’huissier instrumentaire ne pouvait, sans y avoir été expressément et précisément autorisé, produire aux personnes présentes ceux des objets visés par l’ordonnance afin de recueillir leurs déclarations spontanées quant aux actes argués de contrefaçon, de sorte qu’en procédant comme il a fait, l’huissier instrumentaire a excédé les limites de sa mission, la cour d’appel en validant les opérations a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 28 mai 2008, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ; Condamne la société Invicta aux dépens ; Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer aux sociétés France Gift et Coccinelle la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille neuf.